Les limites des thérapies individuelles

On parle souvent du développement personnel comme d’un chemin vers une meilleure version de soi-même. Mais je trouve dangereux de croire que tous nos mal-être leur origine en nous seuls. Cette idée, malheureusement bien trop répandue, conduit à une forme d’auto-culpabilisation : « Si je souffre, c’est parce que j’ai des failles que je n’ai pas encore réparées ». Or ce n’est pas toujours vrai. Et on le dit souvent, les personnes qui prennent rendez-vous pour une thérapie, on déjà fait la moitié du chemin.
J’en vois même des personnes qui viennent toujours venir chercher la petite bête en elles-mêmes, prenant presque à leur charge, les manquements d’autrui… ( bien sûr ceci peut être travaillé aussi )

Nos souffrances naissent en nous, mais en lien aussi à un environnement qui peut être injuste, violent, inadapté, etc…

  • Les conditions de travail, parfois déshumanisantes.
  • Les pressions économiques, qui enferment dans la précarité.
  • Le poids des discriminations de tous genres
  • Les violences systémiques, visibles ou invisibles, qui marquent les corps et les esprits.

Dans ces contextes, aucune thérapie individuelle ne peut, à elle seule, transformer la réalité extérieure. Elle peut aider à tenir debout, à ne pas s’effondrer, à préserver sa dignité intérieure, elle peut impacter, faire miroir, modèle, mais elle ne saurait remplacer une transformation collective.
C’est là que réside une limite essentielle : si l’on réduit la souffrance au seul prisme de l’individu, on efface les responsabilités sociales et politiques. On déplace le problème et ce qui devrait être reconnu comme une injustice systémique devient ne «fragilité personnelle» à réparer. Et cela peut être destructeur. Les abuseurs de toutes sortes connaissent bien la méthode: faire passer leur violence pour les fragilités des victimes.

Alors, faut-il abandonner les thérapies individuelles ? Bien sûr que non. Elles restent un outil de réparation essentiel, mais elles gagnent à être pensées en lien avec d’autres dimensions :

  • La solidarité et le collectif.
  • Les mouvements sociaux et politiques qui cherchent à changer les structures.
  • Les pratiques communautaires qui restaurent le sentiment d’appartenance.
  • L’art, la création, le partage, qui ouvrent des voies de résistance et de sens.

Se soigner individuellement, oui, bien sûr ! Mais sans jamais perdre de vue qu’une guérison véritable passe aussi par une évolution commune.